Gazettescope

Gazettescope : en rose et bleu, j’aimerai mon entreprise...

C’est l’un des symboles les plus caricaturaux des stéréotypes de genre : «le rose, c’est féminin, le bleu, c’est masculin». Un cliché gros comme un camion. Savez-vous que ce que l’on croit être un héritage culturel hérité de temps anciens n’est en fait qu’un immense et génial coup marketing dans lequel nous sommes tous tombés, et que nous alimentons tous les jours. Rose, bleu, au fait, que signifie ce duo en entreprise ?

Ce n’est pas un scoop. Les clichés ont la peau dure. Et on pense à tort qu’ils remontent à la nuit des temps. Prenons cet exemple qui pourrait sembler bien léger, voire anecdotique, et qui est pourtant bien ancré dans nos esprits. Le rose, c’est «girly», le bleu, pour les petits mecs. Cela s'accentue avec l’âge adulte. Voilà comment cette dichotomie chromatique se retrouve à tous les étages de notre société de surconsommation, des rayons jouets (à ce propos, aux rayons garçons et rayons filles, des rayons enfants tout simplement, ne seraient-ils pas plus opportuns ?) à ceux de l’habillement. Et infuse chez les adultes qui peinent à s’en défaire. Vous imaginez offrir un pull rose à votre boss ? Il y aura quelques hésitations. Une rapide plongée dans des époques bien lointaines, de l’Antiquité au Moyen-Âge, nous indique que les couleurs rose et bleu n’avaient pas de délimitations aussi précises que nous les connaissons actuellement pour les deux sexes. Au 18e siècle, le rose est la couleur favorite de la marquise de Pompadour. L’effet mode le fait se retrouver dans la déco et les vêtements. Jusqu'au début du 20e siècle, la règle commune, plus qu'une obligation, est «que le rose, couleur plus forte, va mieux aux garçons, et que le bleu, plus délicat, est plus joli sur les filles.» Mais, là encore, rien de bien ancré. On chemine au gré des siècles. Le tournant se situe aux années 50 et à la naissance de la société de consommation, de l'autre côté de l'Atlantique. Avec cette idée marketing édictée aux États-Unis : «Plus on individualise le vêtement, plus on le vend». En somme, il s’agit de distinguer les genres en leur attribuant des couleurs, des motifs et des slogans. Cela permet de multiplier les marchés. Et les profits ! Cela, la mondialisation arrivant va adorer ! Un enchaînement sans fin débute : les habits du petit garçon du foyer ne pourront pas s’échanger avec ceux de sa petite sœur. Des générations de parents se voient contraints de racheter des affaires à l’infini. À l’aube des années 60 naissent d’autres préceptes marketing made in US, qui déferlent sur le monde, comme une célèbre marque de fast food le fera dans un autre domaine : la fille jouera à la poupée ou à la maman, ouatée dans un univers de rose, couleur de la douceur et de la grâce, le garçon fera la guerre, jouera à la voiture ou au robot, le tout vêtu souvent de bleu. Pourtant, toutes les petites filles n’ont pas envie forcément de poney ou de rose, quand les petits garçons, eux, peut-être si. Revenons donc à notre monde d’adultes. Si les couleurs font partie de nos quotidiens, elles nous influencent plus que nous le pensons, évoquant des sentiments, des sensations, des souvenirs. Dans le monde de l’entreprise, elles sont utilisées depuis toujours. Elles sont un vecteur puissant pour séduire une clientèle. Et voilà que le rose et le bleu - toujours eux -, se sont invités dans le marketing entrepreneurial. Le bleu, apprécié pour son sérieux, est utilisé par nombre d’entreprises pour promouvoir leur image et leurs produits. Le rose a envahi la communication liée à la confiserie, la mode, les produits de consommation féminins, la maison. Le meilleur exemple pour faire bouger les lignes de ces préétablis vient du rugby. Sport viril par excellence. L’équipe parisienne du Stade Français arbore depuis plusieurs années un joli maillot rose. Alors dans la vie courante, en entreprise, quant aux couleurs, au final, si chacun faisait comme il le veut, selon ses envies et ses humeurs du jour ? Les clichés, on les range dans le tiroir ? Chiche...