Entreprises

Abandon de poste : la loi modifie la donne dans les entreprises

Le décret d’application sur l’abandon de poste, validant la suppression des indemnités chômage pour les salariés concernés, a été avalisé par le Conseil constitutionnel et est entré en vigueur dès ce mardi 18 avril. Décryptage pour les chefs d’entreprise mosellans. Ce qui peut paraître simple de prime abord pourrait s'avérer plus compliqué dans son application sur le terrain. Car, d'un texte, il s'agit de le faire correspondre au monde réel, celui du quotidien des entreprises...


L'employeur dispose d'un nouveau cadre quant à l'abandon de poste.
L'employeur dispose d'un nouveau cadre quant à l'abandon de poste.

Depuis ce mardi 18 avril, l’abandon volontaire de poste par un salarié est assimilé à une démission. Il s’agit ici d’une mesure de la loi «portant mesures d’urgence relative au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi» souhaitée par le gouvernement. Cette mesure a été validée par le Conseil constitutionnel. Le décret d’application a été publié, la loi entre donc en vigueur officiellement : «Le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, dans le délai fixé par l’employeur, est présumé avoir démissionné à l’expiration de ce délai», stipule la nouvelle loi.

Un changement de paradigme

C'est un changement important. Jusqu'à présent, les salariés qui abandonnaient leur poste pouvaient prétendre dans la plupart des cas (faute lourde exclue) aux allocations chômage, cet abandon débouchant sur un licenciement pour «faute». Désormais, assimilé à une démission, l'abandon de poste ne donnera accès à aucune allocation. Selon une étude la Dares (Direction de l’animation, de la recherche, des études et de la statistiques) publiée en février 2023, 70 % des licenciements pour faute grave auraient pour motif un abandon de poste. Le décret d'application précise les nouvelles modalités. «L'employeur qui constate que le salarié a abandonné son poste et entend faire valoir la présomption de démission (...) le met en demeure, par lettre recommandée ou par lettre remise en main-propre contre décharge, de justifier son absence et de reprendre son poste dans un délai de 15 jours.»

Traduire sur le terrain...

Le législateur a néanmoins prévu que cette présomption puisse être annulée si l'abandon de poste a été provoqué par des manquements de l'employeur : «Dans le cas où le salarié entend se prévaloir auprès de l'employeur d'un motif légitime de nature à faire obstacle à une présomption de démission, tel que, notamment, des raisons médicales, l'exercice du droit de retrait, l'exercice du droit de grève, le refus du salarié d'exécuter une instruction contraire à une réglementation ou la modification du contrat de travail à l'initiative de l'employeur, le salarié indique le motif qu'il invoque dans la réponse à la mise en demeure précitée.» Dans le même temps, «le salarié qui conteste la rupture de son contrat de travail sur le fondement de cette présomption peut saisir le conseil de prud’hommes. (...) Il statue au fond dans un délai d’un mois à compter de sa saisine.» Reste à maintenant à cette nouvelle donne quant à l'abandon de poste à se traduire dans les entreprises. Cela pose des questions auxquelles chefs d'entreprise et managers vont être rapidement confrontés. La situation dans laquelle employeur et salarié pouvaient se séparer en y trouvant chacun son compte, le premier ne payant ni indemnité de licenciement ni indemnité de préavis, le second pouvant bénéficier des allocations Pôle emploi, est à présent caduque. Le risque n'est-il pas de voir les arrêts maladie se multiplier ? D'un accroissement des licenciements pour inaptitude ? Le court terme nous renseignera sur l'impact réel de la loi...