Entreprises

Entrepreneur, pas n'importe comment...

Jamais la Moselle n’avait compté autant de créations d’entreprise que sur ces quatre premiers mois de l’année. Tendance observée dans la foulée de la crise sanitaire. 7 néo-entrepreneurs sont des micro-entrepreneurs dans le département. Pourquoi un tel engouement ? Les raisons se situent entre réalités socio-économiques et aspirations sociétales. Le modèle de «start-up nation» a aussi son revers de la médaille...

L'accès à l'entrepreunariat a beaucoup progressé ces dernières années, il est d'abord l'histoire de parcours d'hommes et de femmes : celui de leur chemin de vie.
L'accès à l'entrepreunariat a beaucoup progressé ces dernières années, il est d'abord l'histoire de parcours d'hommes et de femmes : celui de leur chemin de vie.

4 409. C’est le nombre de créations entreprises enregistrées en Moselle sur les quatre premiers mois de l’année, selon les données de l’Insee. Soit +12,94 % par rapport à même période mesurée l’an passé… et + 56,57 % par rapport à 2019. Alors pourquoi créent-ils ? «Exercer une activité conforme à mes valeurs», «réaliser un rêve», «être mon propre patron» sont les raisons couramment avancées dans le faisceau d’enquêtes parues sur le sujet. Selon OpinionWay, 7 Français sur 10 considèrent «qu’ils trouveraient plus de sens à leur travail au quotidien s’ils étaient à leur compte». Comme un révélateur. La Banque mondiale indiquait ces derniers mois «qu’il fallait quatre jours pour créer son entreprise en France, comme aux États-Unis, contre cinq jours au Royaume-Uni, 8 en Allemagne, 11 en Italie, 13 en Espagne.» Un délai très court qui n’est peut-être pas étranger à l’évolution positive du nombre de créations dans notre pays.

D'autres aspirations...

L’environnement économique hexagonal a connu des changements majeurs qui ont favorisé l’essor de l’entrepreneuriat. Des réformes législatives et fiscales ont été mises en place pour encourager la création et faciliter les démarches administratives. Le régime de l’auto-entrepreneur a simplifié les formalités de création d’entreprise et réduit les charges sociales pour les entrepreneurs. Pas un hasard, si en Moselle, près de 70 % des nouvelles entreprises sont des micro-entreprises. De plus, des mesures ont été prises pour soutenir les start-up, comme la simplification des procédures de financement et l’incitation à l’investissement dans l’innovation. Également, et cela se vérifie de jour en jour, depuis la pandémie, les mentalités ont évolué. Un nombre croissant de personnes considèrent l’action d’entreprendre comme une alternative viable à un emploi traditionnel. Les attentes professionnelles changent avec une recherche constante de sens et de réalisations personnelles. Les individus aspirent à plus de liberté, de créativité et de satisfaction dans leur vie professionnelles. Ainsi, qu’un meilleur équilibre avec leur vie privée.

Une réalité en trompe-l'œil

Un autre facteur est déterminant : l’avènement de la technologie et de l’économie numérique. Internet et les plateformes numériques ont facilité la création et la gestion d’entreprises. Pléthore d’entrepreneurs ont lancé des start-up technologiques en développant des produits et des services innovants. Cela touche des secteurs liées à la communication, la fintech, la santé numérique, l’e-commerce… Attention à ne pas tomber dans l’idyllique. Que la «start-up nation» tant vantée ne soit pas un mirage, si on se laisse enivrer par ce «boom de l'entrepreneuriat.» En effet, les chiffres de ce dernier décrivent une réalité en trompe-l’œil : certes, le nombre de créations d’entreprises bat chaque année des records historiques, mais plus de 70 % de ces nouvelles entreprises sont créées sous le statut d’entreprise individuelle ou de micro-entrepreneur. Or, les micro-entrepreneurs retirent en moyenne 440 € net par mois de leur activité, un revenu 2,3 fois inférieur au seuil de pauvreté. Les chômeurs, dont un tiers de longue durée, et créateurs éloignés de l'emploi, dont la principale motivation est la création de leur propre emploi pour subvenir à leurs besoins, représentent 40 % des créateurs d’entreprise en France. Ils sont très peu diplômés : 40 % n’ont pas de diplôme qualifiant et 20 % ont un CAP ou BEP.

Entrepreneurs par nécessité

Les recherches s’accordent à dresser un portrait en creux des entrepreneurs par nécessité : ils ne possèdent aucun des traits caractéristiques reconnus aux entrepreneurs à succès. Ils ont une forte aversion au risque, des doutes importants tout au long du processus et souhaitent majoritairement redevenir salariés. En termes de capital social, économique et humain, ils sont également défavorisés : ils sont plus âgés, moins diplômés, moins expérimentés que les entrepreneurs motivés positivement. Ils ont plus de difficulté à percevoir et exploiter les opportunités d’affaires et possèdent peu de réseaux et peu de sources de financement. Ces profils sont cependant extrêmement hétérogènes et présentent des degrés de vulnérabilité variés : femmes, immigrés, jeunes sans diplôme, seniors, cadres quinquas licenciés, repreneurs. Il y a donc beaucoup de travail à faire dans l’éducation à l’entrepreneuriat en évitant de tomber dans un facile angélisme, tout en œuvrant à sa démocratisation.

«Les demandeurs d'emploi, dont un tiers de longue durée, et créateurs éloignés de l'emploi, dont la principale motivation est la création de leur propre emploi pour subvenir à leurs besoins, représentent 40 % des créateurs d’entreprise en France. Ils sont très peu diplômés : 40 % n’ont pas de diplôme qualifiant et 20 % ont un CAP ou BEP.»