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Autour du futur France Travail en Moselle, la grande question de l’employabilité

Les chiffres de l’emploi en Moselle suivent une tendance positive. Dans un an, Pôle emploi devrait voir lui succéder France Travail. Encore perfectible et en phase de construction, le projet gouvernemental porte déjà quelques lignes conductrices quant à ce projet. Quelles conséquences et changements en Moselle ? On fait le point.

Optimiser la recherche et l'accessibilité à l'emploi.
Optimiser la recherche et l'accessibilité à l'emploi.

Au 4e trimestre 2022, en Moselle, le nombre de demandeurs d’emploi tenus de rechercher un emploi et sans activité (catégorie A) s’établit en moyenne sur ce dernier trimestre de l’année à 44 920. Un nombre en baisse de 3,5 % sur un trimestre (soit 1 650 personnes) et de 12,1 % sur un an. Plus largement, le nombre de demandeurs d’emploi tenus de rechercher un emploi, ayant ou non exercé une activité (catégories A, B, C) est en moyenne à 78 170 au quatrième trimestre 2022 : une baisse de 1,8 % sur un trimestre (soit - 1 410 personnes) et de 7,4 sur un an. La note conjoncturelle de Pôle emploi et de la Dares livre quelques indicateurs intéressants pour appréhender la situation locale et des bassins d’emploi mosellans. Trois points évocateurs. Le premier concerne le chômage des moins de 25 ans. Sur la même période observée, pour les catégories A, B et C, 9 250 jeunes mosellanes et mosellans étaient inscrits à Pôle emploi : un peu plus d’un demandeur d’emploi dans le département.

France Travail, évolution ou révolution ?

Second point : le chômage des 50 ans et plus, ces seniors au cœur de la réforme des retraites. Dans notre département, toujours en catégories A, B et C, ils se comptent au nombre de 22 400 (un tiers des demandeurs d’emploi). Si les données sont clairement à la baisse sur un an pour ces jeunes (- 6,2 %) et les seniors (- 6,9 %), on note un net ralentissement de cette tendance positive entre le 3e et le 4e trimestre (respectivement, + 0,1 % et 2,1 %). Enfin, troisième point, celui de l’ancienneté des demandeurs d’emploi A, B et C. Sur les 78 170 individus identifiés, 36 480 sont inscrits à Pôle emploi depuis un an et plus, soit 46,7 % (dont 21 300, soit 59 % depuis deux ans et plus). Ici aussi, les bons chiffres du début 2022 connaissent en fin d’année un ralentissement. Les semaines à venir nous diront s’il s’agit d’un coup de mou passager ou d’un retournement plus durable, lié aux incertitudes économiques qui impactent les entreprises. Ce faisceau de statistiques de ce début 2023 s’inscrit dans la mise en chantier du dispositif France Travail. Élément du programme présidentiel d’Emmanuel Macron, il reste encore pour l’heure à l’état gazeux. Dans son ADN, il doit succéder à Pôle emploi à partir de début 2024, avec ce leitmotiv : «tout le monde est employable». Sur le papier, il s’agit de simplifier et d’améliorer l’aide déployée au bénéfice des demandeurs d’emploi ou bénéficiaires du RSA pour qu’ils retrouvent du travail, et des entreprises pour qu’elles réussissent à embaucher, particulièrement celles qui se situent sur des secteurs en tension. On se situe là dans l’objectif de plein-emploi au terme du quinquennat, en 2027. Les premières réunions relatives à la mise en orbite par étapes progressives de France Travail ont livré un diagnostic de la situation actuelle quant au parcours d’insertion mettant en lumière freins et disparités : intervenants dispersés, pratiques et orientations hétéroclites, accompagnement parfois plus formel que réel, perspective d’insertion professionnelle reléguée, obstacles liés aux logement, au transport, à la santé, manque d’engagements réciproques.

Le partage des données entre acteurs de l'insertion

L’une des pierres angulaires de France Travail reposera sur un accroissement de partage de données et de logiciels communs. Si la lourdeur administrative à laquelle sont confrontés, notamment les agents de Pôle emploi, pouvait diminuer, cela serait un plus certain pour pleinement les centrer sur leur cœur de métier et leurs compétences techniques. On l’a compris, le projet France Travail vise à donner de la visibilité et plus de coordination entre les acteurs qui interviennent auprès des demandeurs d’emploi (Pôle emploi, missions locales, Cap emploi, départements, associations…). Sur les bassins d’emploi, comme ceux de la Moselle, le but est d’avoir, par territoire, une vision claire de tous les demandeurs d’emploi, des accompagnements dont ils bénéficient et de leur retour à l’emploi. La création de France Travail nécessitera, en amont de son application, une traduction législative sur plusieurs de ses points dans le projet de loi sur le plein emploi, prévu pour ce printemps. Il restera, quand il sera effectif, à France Travail à prendre en compte toutes les modifications psycho-sociale accélérées par la crise pandémique chez nombre de personnes sur la place du travail dans nos vies, particulièrement chez les jeunes qui font tomber les codes du monde d’avant en la matière. Faire du neuf en reprenant les recettes ultérieures n’est pas toujours source de réussite. Les légitimes ambitions chiffrées et de simplification du parcours d’insertion ne sauraient être déconnectées de cette question essentielle qui traverse toute la société : en 2023, qu’est-ce exactement le travail ? Pas seulement dans sa dimension technique, mais également humaine. En Moselle, c'est un vaste écosystème de l'insertion qui est au cœur de ce changement de paradigme, avec, au premier chef, les agences de Pôle emploi à Creutzwald, Forbach, Hagondange, Hayange, Thionville-Manom, Metz, Montigny-lès-Metz, Saint-Avold, Sarrebourg et Sarreguemines. France Tremplin s'appuiera d'abord sur l'expertise de ces agents du service public de l'emploi.

«Corners France Travail» 
C'est la dénomination de l'une des propositions du projet France Travail. Elle entend aller chercher tous ceux qui demeurent en marge du service public de l'emploi. L'inscription donnera lieu à un diagnostic de la situation et une orientation vers le bon référent dans un délai garanti. Puis à la signature d'un contrat d'engagement unifié détaillant les droits et devoirs communs à la personne aidée et à la structure aidante. Y figureront les actions pour lever les freins et aussi la possibilité d'une condition d'activité de 15 à 20 h hebdomadaires associée à des paliers progressifs de sanctions. Tout cela sera consigné dans un dossier unique. Sur le volet des entreprises, toutes leurs offres d'emploi seront partagées. Le nombre de conseillers spécialisés est annoncé en augmentation (la cible et les moyens ne sont pas encore précisés). Enfin, certains dispositifs seront plus accessibles, comme la préparation opérationnelle à l'emploi. D'abord expérimentées, ces pistes seront amenées à se généraliser en 2024.