Un désaccord majeur sur le budget européen

Les dirigeants des 27 États membres n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur le premier budget de l’Union européenne (UE) sans le Royaume-Uni.
Les dirigeants des 27 États membres n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur le premier budget de l’Union européenne (UE) sans le Royaume-Uni.

Les dirigeants des 27 États membres n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur le premier budget de l’Union européenne (UE) sans le Royaume-Uni. Plusieurs pays refusent d’augmenter leur contribution…

Vendredi 21 février, après plusieurs dizaines d’heures de discussions, négociations et palabres, le Conseil européen s’est achevé sur un constat d’échec : il n’a pas été possible aux 27 États membres de s’entendre sur un budget commun pour la période 2021-2027. D’un côté, quatre pays appelés «les frugaux» (Danemark, Autriche, Suède et Pays-Bas) ont unanimement refusé de consacrer plus de 1 % de leur revenu national brut au futur budget européen. De l’autre, des pays en ordre dispersé ont cherché, tant bien que mal, à sauver les politiques européennes qui leur profitent le plus.

Dépenses et recettes du budget européen

Les recettes du budget de l’Union proviennent à 70 % des contributions des États membres, en fonction du poids économique de chaque pays mesuré par le revenu national brut (RNB), et pour le reste, essentiellement, des droits de douane et d’une partie de la TVA. Au total, les recettes du budget de l’UE pour 2019 s’élevaient à 148,2 milliards d’euros, 107 milliards de ressources RNB, 21,5 milliards de droits de douane, 17,7 milliards de ressources TVA et 2 milliards d’autres recettes (taxes, amendes, contributions de pays tiers…). Près de 40 % des dépenses sont consacrées à la politique agricole commune (PAC) et 30 % à la politique de cohésion, dont l’objectif est de réduire les inégalités régionales et sociales au sein de l’UE. Chaque État membre contribue certes au financement du budget européen, mais il reçoit également des fonds dans le cadre des politiques menées par l’UE. L’un dans l’autre, l’Allemagne, la France, l’Italie ou l’Autriche sont des contributeurs nets, tandis qu’au contraire la Grèce, la Hongrie ou la Pologne sont des bénéficiaires nets. Mais un tel raisonnement purement comptable néglige, entre autres, les avantages/désavantages liés à l’appartenance au Marché unique.

Le cadre financier pluriannuel

Le budget de l’Union, ou cadre financier pluriannuel (CFP), fixe les dépenses maximales liées aux grandes politiques : marché unique, sécurité, cohésion, environnement… Proposé par la Commission européenne, le budget est ensuite discuté et amendé par les États membres, afin d’obtenir l’unanimité au Conseil de l’UE. Enfin, il doit être approuvé à la majorité par les députés du Parlement européen, qui disposent du droit de bloquer le texte, mais pas de le modifier. Mais en pratique, on constate que c’est dans le cadre du Conseil européen que les chefs d’États s’entendent sur les grandes lignes du cadre financier pluriannuel…

1 100 milliards d’euros sur sept ans

Pour la période 2021-2027, la Commission européenne a proposé un budget de 1,11 % du revenu national brut des 27 États membres, soit 1 135 milliards d’euros. Pour compenser les 84 milliards d’euros sur sept ans liés à la sortie du Royaume-Uni et mener des politiques plus ambitieuses, notamment en faveur de la transition énergétique, le budget était prévu en hausse de 5 % par rapport à la période 2014-2020. Mais dans un contexte marqué par des finances publiques dégradées et un sentiment européen en perte de vitesse, la Commission européenne n’a finalement eu d’autre choix que de prendre à Pierre pour donner à Paul, ce qui en langage budgétaire signifie couper dans la PAC – dont la France est le premier bénéficiaire – et les fonds de cohésion. Bien entendu, cela a provoqué l’ire des États bénéficiaires et même du Parlement européen, qui appelle de ses vœux un budget de l’Union à 1,30 % du RNB, soit 1 324 milliards d’euros. Désormais, de nombreuses options sont sur la table pour les futures négociations : révision des politiques européennes prioritaires, création de nouvelles ressources propres…

Un pacte vert pour l’Europe

Tandis que les chefs des États membres n’arrivent toujours pas à s’entendre sur un budget pour l’Union, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen a présenté un ensemble de mesures destinées à accompagner la transition écologique et à faire de l’Europe le premier continent neutre en carbone à l’horizon 2050. Investissements dans la recherche et l’innovation, réduction des émissions… baptisé New Green Deal, ce pacte vert européen se donne pour objectif «qu’au moins 25 % du budget soit consacré à la lutte contre le changement climatique», selon la présidente de la Commission européenne, c’est-à-dire 100 milliards investis chaque année si l’on tient compte des effets de levier. Ce montant peut sembler important, mais c’est hélas très en deçà des montants nécessaires pour atteindre les objectifs… En tout état de cause, eu égard aux intérêts manifestement incompatibles des 27 États membres et au coup porté par le Brexit au budget et à l’image de l’UE, l’on ne peut que se montrer pessimiste sur les chances d’appliquer ce pacte vert…

Raphaël DIDIER