Conjoncture

La réouverture annoncée des CHR n’efface pas les risques...

Le Cercle Perspectives, regroupant 17 des 60 premiers cabinets d’expertise comptable et près de 15 000 professionnels, a publié en ce printemps une enquête sur le risque de défaillance des cafés, hôtels et restaurants. Intéressant à l'annonce du déconfinement. Menée auprès d’un panel de plus de 1 500 établissements indépendants issus de toutes les régions de France, l’étude montre que les 2/3 des CHR sont dans une zone de turbulences, malgré la réouverture progressive attendue. À mettre en perspective quant à la situation des professionnels mosellans, lesquels s'inscrivent dans ce panorama n'occultant pas les incertitudes et inquiétudes économiques des mois à venir...


À l'heure d'une reprise progressive, le niveau de risque de défaillance des CHR en Grand Est s’établit à une moyenne de 51 % (contre 50 % au niveau national).
À l'heure d'une reprise progressive, le niveau de risque de défaillance des CHR en Grand Est s’établit à une moyenne de 51 % (contre 50 % au niveau national).

Dans une économie dont des pans entiers sont mis sous respiration étatique depuis des mois, les cafés, les hôtels et les restaurants ont été lourdement impactés par les mesures de restrictions sanitaires et les confinements successifs. L’étude du Cercle Perspectives a été conçue comme un outil de pilotage autour de cinq indicateurs clé (redressement judiciaire, consommation du PGE, activité partielle, retard sur les charges sociales/fiscales et impayés fournisseurs). L’objectif a été de mesurer le risque de défaillance dans ce secteur d’activité stratégique pour l’économie nationale qui emploie plus d’un million de personnes et génère 60 Mrds € de chiffre d’affaires.

Beaucoup d'incertitudes pour l'avenir

Laurent Chapart, président du Cercle Perspectives fait cette analyse :«Paralysés depuis le mois de novembre, les professionnels des cafés, hôtels et restaurants se préparent à la réouverture de leurs établissements à la suite des dernières annonces du gouvernement, mais restent suspendus à l’incertitude d’un couvre-feu en yo-yo. Cette perspective encourageante n’enlève rien à la précarité de leurs situations financières. Malgré les aides, dont ils bénéficient depuis le début de la crise sanitaire, 2/3 des établissements indépendants CHR présentent sans grande surprise des risques élevés de défaillance. Un chiffre particulièrement préoccupant qui appelle à la mise en place de mesures toniques pour accompagner dans la durée ce secteur d’activité stratégique, telles que l’allongement de la durée du remboursement du PGE ou la suppression temporaire des charges sociales sur les salaires. La remise en route des établissements va prendre du temps et peser sur les résultats : les dirigeants devant notamment faire face à une pénurie de main-d’œuvre.»

PGE et activité partielle : les amortisseurs

La méthodologie pour jauger de l’état de santé de la branche des CHR est la suivante : chaque indicateur constitue un palier de 25 % de risque de défaillance, pouvant s’additionner selon la situation de l’établissement analysé. Si une entreprise cumule les quatre situations, son risque de défaillance s’élève à 100 %. L’étude intègre également les cas de redressement judiciaire pour lesquelles le risque s’établit directement à 100 %. Si seulement 2 % des établissements analysés sont en situation de redressement judiciaire, le baromètre enregistre un niveau moyen de risque de défaillance à 50 % pour les cafés, hôtels et restaurants. En regardant plus en détail, 2/3 des établissements analysés présentent un niveau de risque de défaillance égal ou supérieur à 50 %. Sans surprise, 85 % des établissements issus de l’échantillon font usage de l’activité partielle, qui joue pleinement son rôle d’amortisseur pour le secteur des CHR. Près de 2/3 des établissements indépendants ont entamé leur Prêt Garantie par l’État pour payer leurs frais fixes et préserver leur flexibilité financière, dans l’attente d’un assouplissement des restrictions sanitaires. 31 % des établissements affichent un retard de paiement des charges sociales ou fiscales alors que seulement 18 % des CHR accusent des impayés fournisseurs : les chefs d’établissement ont fait le choix de payer leurs engagements, au détriment des charges administratives, afin d’assurer l’approvisionnement des marchandises lors de la réouverture mais aussi par esprit de solidarité avec leur écosystème. Le montant du PGE qui ne peut dépasser 25 % du chiffre d’affaires de l’établissement reflète la taille de l’établissement et de son chiffre d’affaires. Les entreprises ayant bénéficié d’un PGE significatif de 249 000 euros présentent des risques de défaillance moins élevés que celles ayant réalisé un emprunt inférieur. Autrement dit, les établissements de petite taille accumulent proportionnellement plus de risques de défaillance que ceux de grande taille.

Des situations disparates selon les secteurs d'activité

Certains secteurs d’activité du marché des CHR présentent des risques de défaillance plus élevés. C’est le cas des services de traiteur. 34 % des entreprises affichent là un niveau de risque de défaillance compris entre 75 et 100 %. Cela peut s’expliquer notamment par la nature du marché qui est lié à l’événementiel, l’un des secteurs les plus durement touchés depuis le début de la crise sanitaire. A contrario, les campings enregistrent le plus faible niveau de risque de défaillance. L’activité a bénéficié d’une saison estivale 2020 encourageante qui a permis aux chefs d’entreprise de se constituer une trésorerie suffisante durant la saison hivernale où ils sont fermés. Restauration traditionnelle, débit de boissons et hôtel/hébergement sont en souffrance. L'hébergement touristique et la restauration rapide semblaient limiter les dégâts. Désormais, la fin du confinement est actée. Le 19 mai, les terrasses seront à nouveau ouvertes (tables de 6 personnes maximum). Le 9 juin, les restaurants et cafés pourront accueillir la clientèle en intérieur (toujours avec des tables limitées à 6 personnes). Le 30 juin marquera la fin du couvre-feu. Si une vie sociale et conviviale devrait pouvoir à nouveau s'articuler, sa pérennisation dépend évidemment de l'évolution de la situation sanitaire, et donc de la responsabilité individuelle de chacun. Pour les professionnels des CHR, une bouffée d'oxygène se profile. Même si tout ne peut passer du noir au rose du jour au lendemain. Notamment quant au paysage socio-économique...

Le risque de défaillance en Grand Est par secteur d’activité

Hôtel et hébergement 63 %

Restauration traditionnelle 50 %

Restauration rapide 43 %

Débit de boissons 52 %