Territoires

Hausse du coût de l’énergie : quelles conséquences sur la continuité de service et le tarif de l'eau en Moselle ?

Sept syndicats et régies d’eau et d'assainissement mosellans sont cosignataires d’un appel régional. Ils alertent, dans un contexte de crise planétaire, sur les risques quant à la continuité de service et sur le tarif de l’eau. En Moselle, cela concerne le quotidien de plus de 300 000 habitants. Les inquiétudes sont grandes du côté de ces syndicats et régies. Explications. 

Les crises successives subies font prendre conscience que l'eau demeure un élément naturel précieux et non inépuisable à l'infini.
Les crises successives subies font prendre conscience que l'eau demeure un élément naturel précieux et non inépuisable à l'infini.

Sept syndicats et régies d’eau et d'assainissement mosellans sont cosignataires d’un appel régional. Ils alertent, dans un contexte de crise planétaire, sur les risques quant à la continuité de service et sur le tarif de l’eau. En Moselle, cela concerne le quotidien de plus de 300 000 habitants. Les inquiétudes sont grandes du côté de ces syndicats et régies. Explications.

Régie de l’eau de l’Eurométropole de Metz, SIVOM de l’Alzette, Syndicat intercommunal des Eaux de Gravelotte et de la Vallée de l’Orne, Syndicat intercommunal des Eaux de la Vallée de l’Orne Aval, Syndicat Mixte Eau & Assainissement de Fontoy Vallée de la Fensch, Syndicat Mixte des Eaux de l’Est-Thionvillois et Syndicat Mixte de Production d’Eau Fensch Lorraine. Ces sept entités territoriales groupent dans leur totalité 111 731 abonnés. Elles sont cosignataires avec leurs homologues de Meurthe-et-Moselle, du Syndicat intercommunal d’Assainissement du Jarnisy, du Syndicat du Contrat Rivière Woigot, du Syndicat intercommunal des Eaux de Piennes, du Syndicat intercommunal des Eaux du Soiron, et de Meuse du Syndicat Mixte des Eaux Laffon de Ladebat.

Exclus du bouclier tarifaire

Tous ces syndicats et régies d’eau représentent en Lorraine 178 714 abonnés et une densité de population de 398 464 individus. Ils sont aujourd’hui lanceurs d’alerte, notifiant leurs vives inquiétudes. Leur propos expose la situation : «Les communes et collectivités ainsi que les entreprises privées bénéficient de boucliers tarifaires contre la hausse des prix de l’énergie. Le statut des Régies et Syndicats (Établissement Public Industriel et Commercial) ne leur permet pas d’en bénéficier. Les modalités d’application de l’amortisseur d’électricité présenté récemment par le gouvernement sont encore inconnues. Ainsi, pour certains services publics de l’eau et de l’assainissement, les dépenses d’électricité passent en 2021 de 225 000 € à 700 000 € estimés pour 2023, d’autres d’un million d’euros à 7 millions d’euros soit une augmentation de plus de 300 % à 700 %. Les aides de l’État doivent s’appliquer en toute équité à l’ensemble des services considérés quel que soit leur mode de gestion car in fine, c’est l’usager qui en payera le prix.»

Les entreprises impactées

Poursuivant sur la hausse du coût des matériels, des travaux et pénurie de fournitures : «Les fournisseurs de produits et matériaux ainsi que les prestataires de travaux indispensables à la continuité de service public ont déjà annoncé des augmentations de prix de 5 à 300 %. Certaines de ces augmentations apparaissent non justifiées et s’apparentent ainsi à de la pure spéculation. Globalement, suivant les volumes, la charge moyenne sur les budgets de nos syndicats et régies est d’environ 22 % par rapport à 2022. De plus, au-delà des hausses de tarifs, il existe un risque important de rupture d’approvisionnement de produits essentiel à la potabilisation ou à l’épuration de l’eau.» Revenant sur un potentiel délestage électrique : «La distribution d’eau potable, l’évacuation et le traitement des eaux usées ne sont pas considérés par l’État comme services prioritaires ou essentiels à la Nation. Le délestage électrique s’appliquera donc à ces services comme à vous tous. Un certain nombre de nos équipements de production d’eau ou de distribution sur le réseau nécessitent de l’électricité pour fonctionner (pompage, refoulement, surpression…). Selon les secteurs délestés, des risques de rupture d’alimentation en eau potable sont possibles pendant tout ou partie de la durée du délestage électrique. Certains hôpitaux, écoles, Établissements pour Personnes Âgées, services de secours et la défense incendie pourraient ne plus être alimentés, ou avec un faible débit. De même pour le réseau d’eau usée ou le réseau pluvial, les pompes de relevage et les stations de traitement pourraient être à l’arrêt. Le réseau montera en charge, jusqu’à déborder si l’électricité n’est pas rétablie à temps. Il sera impossible de mobiliser suffisamment de groupes électrogènes (30 à 50 postes de relèvement pour certains syndicats) en étant prévenu la veille. Des déversements d’eaux usées dans le milieu naturel seront inéluctables. Certaines caves, locaux d’entreprises pourraient subir le même sort.»

Un tarif de l'eau à la hausse ?

Les 12 cosignataires concluent : «Les budgets des Régies et Syndicats doivent être équilibrés. Les recettes proviennent uniquement du prix de l’eau et de l’assainissement. Par l’exemple, si les charges augmentent de 600 000 € à 6 M€, il faudra percevoir d’autant de plus de recettes. Quand bien même la sobriété et les économies sur d’autres postes sont de mise, celles-ci n’y suffiront pas. Le tarif de l’eau devra obligatoirement être ajusté à la hausse. Concernant le maintien de la continuité de service qui nous incombe à tous, des solutions de type groupes électrogènes ou modification des horaires de pompage peuvent être envisagées. Toutefois, il n’est pas possible de compenser partout les délestages. De plus, le coût d’achat ou de location de groupes (de plusieurs dizaines de milliers d’euros) et la consommation de gasoil auront un impact financier supplémentaire. Tout cela est en contradiction avec la protection de l’environnement à l’heure de la COP27. Priver la population d’eau potable est dangereux. L’évacuation et le traitement des eaux usées pollueront le milieu naturel avec des conséquences parfois longues à restaurer. Il est indispensable que les sites essentiels à la vie de la Nation (station de production d’eau potable, stations de pompages, station d’épuration, postes de relevage…) soient inscrits par l’État comme sites prioritaires à ne pas délester. En cas de rupture de service, l’État devra être à nos côtés et réquisitionner les matériels et produits pour éviter la mise en péril des ouvrages d’eau et d’assainissement utiles à tous et assumer sa responsabilité en cas de pollution. Au même titre que les services de santé, de police, de secours, les services d’eau et d’assainissement doivent être enfin reconnus comme services essentiels à la Nation. Pour mémoire, dans le contexte actuel énergétique, une incidence financière de l’ordre de 4,50 €/mois sur une base 120 m3 est envisagée par pôle de compétence sur la facture de nos abonnés.»

«Pour certains services publics de l’eau et de l’assainissement, les dépenses d’électricité passent en 2021 de 225 000 € à 700 000 € estimés pour 2023, d’autres d’un million d’euros à 7 millions d’euros soit une augmentation de plus de 300 % à 700 %», affirment les cosignataires de l'appel quant à l'eau et l'énergie.