Gazettescope

Gazettescope : demain, tous invisibles ?

Bienvenue en 2060. Le monde l'entreprise a bien changé. La preuve ! 

Nous sommes en 2060. Il y a 40 ans, la pandémie de la Covid-19 a mis le monde de l’entreprise à rude épreuve. Depuis cette année charnière de 2020, chacun a dû réapprendre à vivre et à travailler autrement. Le télétravail est désormais la norme. Les salariés ne différencient plus leur vie professionnelle de leur vie personnelle. Plus de temps pour déconnecter, la notion d’horaires de travail a disparu. La conséquence a été immédiate et terrible. L’isolement social a peu à peu essaimé dans la société. Le concept de carrière est obsolète, comme celui de bureau. La disparition du lieu de travail est effective. On exerce sa profession depuis son domicile, dans les espace de coworking, dans les lieux de restauration, dans les parcs, des quatre coins du monde… Il demeure bien des bureaux, mais ils sont à présent vides. La machine à café est une relique. En 2060, les enfants naissant ont toutes les chances de vivre bien au-delà des 100 ans. C’est dire, si le terme de «retraite» n’est plus de cette époque. «On est désormais à disposition de l'économie tant que sa santé le permet.» Mais la grande révolution est bien celle de la cohabitation désormais usuelle entre hommes et machines. Les robots ne nous ont pas débarrassés de toutes nos tâches mais au moins d’une grande partie. Ainsi, la pénibilité a disparu, comme de nombreux métiers manuels. L’entreprise a été bouleversée. Chefs comme managers ont été remplacés, du moins leurs missions, de même que les organigrammes et hiérarchies complexes. La norme dans l’entreprise, c’est donner du sens, la primauté à l’intelligence émotionnelle et relationnelle, la coopération permanente, l'implication des salariés dans les directions d'entreprise. Du coup, les recrutements ont reculé les limites de leurs frontières, devenus numériques, analysant de suite les traits de personnalités des candidats. CV et autres lettres de motivations sont d'anciens souvenirs. Le parcours linéaire dans l’entreprise est aussi passé de vie à trépas. En 2060, connecté en permanence, ses données personnelles collectées et analysées 24 h/24 pour nourrir ses besoins sans cesse croissants de consommation, l’être humain se lasse très vite, zappe quasi du jour au lendemain son poste de travail, change de plus en plus vite de voie professionnelle, alterne les fonctions et les métiers, se reconvertit en permanence. Dans cette société où la rentabilité s’est accentuée de façon fulgurante, où il faut tout posséder plus que jamais, même la chose la plus inutile, ce sont à présent les ordinateurs qui permettent de décompter du cryptosalaire le temps où le collaborateur gère ses mails et affaires personnelles. Les moyens de transport sont presque caducs depuis l’apparition de la télétransportation, de la croissance impressionnante des hologrammes. Et surtout, depuis la grande crise climatique de 2040, qui a amené l’humanité à changer tous ses paradigmes antérieurs, pour éviter le chaos. C’était cela ou l’extinction de l’espèce humaine à très court terme. En cet été 2060, une intense chaleur enveloppe le narrateur de ces lignes. Il ouvre soudainement les yeux, amorphe. Et perçoit alors, le sable, l’eau de la mer en face de lui, et toutes ces personnes batifolant, tel un essaim de guêpes, ou allongées sur la plage, dardées des rayons de l'astre solaire. Il se penche sur sa montre qui lui indique «Mardi 2 août 2022, 15 h». Un sourire complice échangé avec sa voisine de serviette, une bonne glace vanille fraise en approche. Ouf, tout réapparait finalement si humain. Un bon coup de soleil, un rêve finalement… Aux étranges effluves de réalité…