Explosion des litiges dans le domaine de l’énergie

La guerre commerciale qui règne entre les entreprises de l’énergie génère un nombre impressionnant de pratiques nocives pour les consommateurs.
La guerre commerciale qui règne entre les entreprises de l’énergie génère un nombre impressionnant de pratiques nocives pour les consommateurs.

En deux ans, les litiges dans le domaine de l’énergie ont augmenté de 38 %. Le médiateur de l’énergie tire la sonnette d’alarme face au comportement des entreprises du secteur qui accumulent les comportements indélicats, voire, malhonnêtes.

C’est ce que l’on appelle une croissance exponentielle : en deux ans, les litiges dans le domaine de l’énergie ont augmenté de 38 %, fruit de comportements déviants des entreprises. Telle est l’alerte lancée par Jean Gaubert, médiateur de l’énergie qui a publié son rapport annuel 2018, le 14 mai dernier. Le marché concerne une trentaine de fournisseurs d’électricité et de gaz naturel qui s’adressent aux particuliers, avec des fournisseurs alternatifs qui gagnent du terrain. En un an, leurs parts de marché en électricité, par exemple, sont passées de 17,9 à 21,9 %. La guerre commerciale qui règne entre ces entreprises génère un nombre impressionnant de pratiques nocives pour les consommateurs, dont rend compte l’activité du médiateur. Au total, en 2018, celui-ci a émis un peu plus de 5 000 recommandations de solutions et accords amiables, contre 3 724, en 2017. Et le constat, c’est que tous les types de litiges sont concernés, même s’ils augmentent dans des proportions diverses. Record, pour les médiations concernant des problèmes de facturation (blocage de factures, erreur sur le prix, règlement non pris en compte…), qui ont bondi de 60 %. Mais l’éventail de litiges dont est saisi le médiateur, et jugés recevables, est très large : 44 % d’entre eux concernent des contestations de niveaux de consommation facturée, 8 % des problèmes de paiements et règlement, 9 %, les prix par rapport aux tarifs, 10 % des soucis de raccordement et de réseau, 7 % les factures et la qualité de la fourniture, 5 % des délais contractuels, 2 % les pratiques commerciales, et 6 % des causes diverses. Seul «motif de  satisfaction» relevé par le rapport : la disparition de litiges récurrents, et  notamment ceux portant sur l’augmentation vertigineuse des prix de prestations techniques. À présent, 80 % des opérations de raccordement sont facturées à partir de forfaits, et non plus sur devis.


Offres «pas si vertes»
 

Au total, ce bilan annuel conduit le médiateur -dans un communiqué- à pointer le comportement déviant de certaines entreprises, qui «ne respectent pas toujours la réglementation». Exemple de norme violée, l’interdiction légale de facturer des rattrapages de consommation de plus de 14 mois. Par ailleurs, le médiateur de l’énergie estime «inacceptable que 12 ans après l’ouverture du marché, les fournisseurs d’énergie ne sachent toujours pas gérer correctement les erreurs de références de compteur, de plus en plus fréquentes, qui empoisonnent la vie des consommateurs qui en sont victimes.» Autre grief, face à des Français encore peu informés, le médiateur juge aussi que «certains fournisseurs jouent sur cette méconnaissance pour conquérir des parts de marché, au risque de détériorer la confiance des consommateurs Bref, au total, le panorama qu’il décrit est celui d’un secteur où le développement de la concurrence s’accompagne d’une floraison de mauvaises pratiques, faites de «méthodes commerciales douteuses», «d’offres vertes pas si vertes», ou encore de «promotions faussement alléchantes.» Le médiateur publie également le taux de litiges par fournisseur (rapporté à 100 000 contrats résidentiels de gaz naturel ou électricité en portefeuille). Pour EDF, le taux s’élève à 35, pour les fournisseurs alternatifs, Engie, à 92, Direct Énergie, à  61, Eni, à 253 et Total Spring à 125 (postérieurement à ce classement, Direct Énergie et Total Spring ont fusionné en Total Direct Énergie). Dernier grief, enfin, du médiateur, si son bilan établit que 86 % des solutions recommandées en médiation ont été exécutées en totalité par les opérateurs, il pointe le comportement de celles qui s’exonèrent de «jouer le jeu de la médiation», en s’affranchissant des délais réglementaires ou ne mettant pas en œuvre les accords acceptés, dans un délai raisonnable. À quelques mois de la retraite, Jean Gaubert souligne ainsi les limites de l’exercice de la médiation.